I'll Keep you safe through the night

Un véritable rugissement animal se fit entendre lorsque les pieds de l’homme quittèrent le sol. Son cri de douleur ne dura qu’à peine une seconde. De peur ou de douleur, nul ne sut.

Le tenant par la gorge à bout de bras, la créature dévoila ses canines qu’il enfonça dans la carotide de sa victime. Le sang chaud pompé par le cœur qui battait encore gicla sur le mur de la contre allée. Le reste coula au fond de sa gorge, laissant quelques traces d’hémoglobine le long de son visage. Bien entendu, il n’allait pas laisser passer l’occasion d’en faire son repas avant de relâcher le cadavre, le regard hagard figé dans l’effroi pour l’éternité. Il y avait deux choses que Louis Desvoges appréciait particulièrement : les cibles consentantes, et les cibles terrorisées.

A peu de choses près il aurait pu laisser la jeune fille se débrouiller seule. Elle semblait bien s’en sortir. Depuis le temps qu’il l’observait, il convenait qu’elle était loin d’être une fragile petite chose, bien au contraire. Mais ce soir, la fatigue et la douleur avaient raison d’elle et la rendait vulnérable face à son ravisseur. C’est pourquoi il avait jugé qu’il était temps d’intervenir. Depuis qu’il la suivait, Desvoges sortit pour la première fois de l’obscurité.

Il baissa les yeux vers la jeune femme à l’instant où son regard se voilait suivant un léger gémissement. Le sang qui lui coulait de la bouche eut le vif effet de titiller la gourmandise du vampire. D’un geste délicat, il passa son pouce sur la lèvre inférieure de la jeune femme inconsciente et en recueillit un peu du fluide vital qu’il porta à ses lèvres avec délice.

Elle semblait fragile en cet instant, et il ne lui en aurait fallu que peu pour en faire son prochain repas. Mais il avait autre chose en tête. Son regard se tourna vers le cadavre exsangue qu’il avait abandonné un peu plus loin. De ce que Louis savait de l’histoire, le malard ne serait certainement pas le dernier que Magyar lançait aux trousses de la gamine.

Glissant un bras sous ses genoux et l’autre sous ses épaules, il la prit dans ses bras. Elle était légère contre lui. Si jeune. Son visage donnait l’impression d’être tout simplement endormie, et le parfum du sang qui s’écoulait de son visage était tout simplement grisant.

Il n’eut pas beaucoup de chemin à faire pour rejoindre sa voiture, et glissa la jeune femme toujours inconsciente sur le siège passager avant de prendre le volant et de démarrer en trombe.

Tout en roulant, il jetait de fréquents et furtifs coups d’oeuils à son inconsciente passagère. Malgré l’obscurité, l’éclairage public lui permet de mieux discerner ses traits. C’est fou ce qu’elle rappelle cette femme qu’il avait autrefois connue.

Le trajet vers leur destination n’est pas très long. Un dernier virage pour entrer dans le parking sous terrain de l‘immeuble du loft de Desvosges. En arrivant, le cadran numérique du tableau de bord affiche 02 :35. Tant mieux. A cette heure ils ne risquent pas de croiser grand monde susceptible de poser des questions en ce demandant que fait cet individu avec une fille inconsciente dans les bras. C’est ce qu'apprécie le vampire de ce quartier : son calme. Lorsqu’il se gare à sa place habituelle, il prend un moment pour observer le visage de la fille de Grayson. Elle semble remuer un peu et ne tardera certainement pas à se réveiller.

L’ascenseur s’ouvre sur son palier, et il dépose la jeune femme sur le large canapé en forme de U de son salon, puis s’assoit en face, attendant qu’elle ne revienne à elle-même